Présentation de l’équipe EGCN – Économie et Gestion de la Culture et du Numérique

Responsables : François Moreau et Isabelle Liotard
Axe de rattachement : Axe 2 (DIM) et Axe 3 (RIS)

Le CEPN a depuis longtemps rassemblé un certain nombre de chercheurs travaillant sur des secteurs bien précis que sont les industries culturelles (qui regroupent l’édition, la musique, le cinéma ainsi que les médias) et l’économie numérique (télécommunications, Internet, logiciels). Ces deux domaines d’activité sont particulièrement stimulants à analyser car leur configuration dans les dernières décennies a fortement évolué en raison notamment des bouleversements liés à l’avènement de l’Internet. Différents outils sont mobilisés pour analyser les transformations technologiques, juridiques, économiques, managériaux et stratégiques des acteurs et des marchés ainsi que leurs implications en termes de régulation. Les chercheurs du CEPN portent leur attention à la fois sur les infrastructures technologiques de l’économie numérique, sur les contenus – notamment culturels – que les réseaux véhiculent, et sur les liens entre gestion des réseaux et valorisation des contenus. Ces travaux s’inscrivent principalement dans les axes « Dynamiques des institutions et des marchés » (DIM) et « Réseaux et interactions stratégiques » (RIS) du CEPN ; de plus, de par leurs objets et méthodes, ils peuvent donner lieu à de nombreuses collaborations avec les autres programmes de travail du CEPN, notamment PROPICE et EMOI. Les chercheurs du programme portent leur attention sur la culture et les réseaux numériques (en particulier Internet) sous trois angles.

La propriété intellectuelle
Les enjeux portant sur la propriété intellectuelle constituent un axe fort du programme. Les questions concernant l’évolution du droit avec le développement de nouveaux objets numériques sont posées. Tout spécialement, les noms de domaines sur Internet ou le développement de plateformes d’innovation appellent des questions sur le rôle de la PI et son évolution. -(i) L’évolution de nouveaux marchés issus des noms de domaines (marchés de la revente) est étudiée. L’analyse économique du réseau internet est relativement peu développée ou l’est de manière très inégale au regard des enjeux. Seule la question du nommage (noms de domaine) a fait l’objet d’approches économiques approfondies en raison de la proximité des noms de domaine et des marques. Par ailleurs, comme il existe un marché primaire et un marché de revente très actif des noms de domaine, les outils de l’analyse économique des marchés peuvent être appliqués à la compréhension des dynamiques marchandes en cours dans cette activité. L’adressage, c’est-à-dire la disponibilité d’adresses uniques permettant aux objets communiquant (de plus en plus nombreux) d’être reliés au réseau internet, est quant à lui beaucoup moins étudié par les économistes. Il s’agit pourtant d’une ressource rare, historiquement distribuée selon des critères non économiques, et actuellement en voie d’extinction. Il existe paradoxalement très peu d’analyses économiques consacrées à l’adressage alors que la gestion des ressources rares non reproductibles est très présente dans la théorie économique. Cette question sera l’un des axes de recherche du programme. Enfin, le routage des informations sur le réseau internet permet aux informations de circuler entre des réseaux indépendants. L’analyse économique du routage doit tenir compte des relations marchandes qui existent entre des réseaux hétérogènes. Un certain nombre de travaux économiques ont été réalisés sur les relations marchandes existant entre les réseaux indépendants constituant l’internet mais l’économie du routage reste peu étudiée. Ces recherches se situent au confluent de l’économie des réseaux et de l’économie industrielle, elles s’inscriront dans des relations avec d’autres programmes de recherche du CEPN. -(ii) D’autres travaux s’interrogent sur les nouvelles plateformes d’innovation du Web (le Web 2.0) à l’aide d’études de cas. Il s’agit dans cette thématique de comprendre comment Internet institue de nouveaux intermédiaires pour permettre aux acteurs économiques de stimuler leur innovation et répondre à des problématiques précises. L’intérêt de cette thématique est également de revenir sur la notion récente de « crowdsouricng » au travers de laquelle les internautes sont à la source de création de « ressources » (idées, innovation) qui « remontent » ensuite aux entreprises. Dans ce contexte, il s’agit aussi de comprendre comment les arrangements contractuels sont à l’œuvre pour soutenir ces processus.

Les industries créatives et culturelles
Une partie des chercheurs du programme mènent leurs recherches sur les industries culturelles et créatives (édition, médias, musique, …). Plusieurs thématiques sont analysées : -(i) La fréquentation des équipements culturels et les enjeux liés à la fidélisation des publics ; -(ii) L’économie du patrimoine dans sa dimension matérielle et immatérielle -(iii) L’influence du numérique sur les industries culturelles. L’attention se porte plus particulièrement sur les transformations amenées par le numérique dans les modes de production, d’échange et de consommation des biens informationnels et culturels. Sont notamment étudiés : l’impact des modèles d’affaires (vente au titre, streaming avec abonnement ou financement publicitaire) et des outils de recommandations en ligne sur la structure de la consommation, et notamment sur la réalité des effets dits de longue traîne ; les stratégies de valorisation des contenus dans un monde numérique ; les problèmes de régulation. Des travaux sont notamment en cours sur le marché du livre numérique et celui de la musique. Au sein du programme « Economie et gestion de la culture et du numérique », ces chercheurs animeront le groupe de liaison « ICCA-CEPN ». Le CEPN est en effet co-porteur du Labex ICCA (Industries Culturelles et Création Artistique) dont les travaux s’inscrivent pleinement dans le projet scientifique du programme « Economie et gestion de la culture et du numérique ». Ils sont menés en collaboration avec le LabSIC (Université Paris 13, co-porteur du Labex ICCA) spécialisé dans les industries culturelles, notamment l’édition.

Histoire de la pensée économique et de l’économie de l’édition
Une partie du programme développe une approche à l’interface de l’histoire de la pensée économique et de l’économie de l’édition. Ces travaux regroupent : -(i) L’évolution de l’édition spécialisée en économie et gestion depuis la Révolution française. Sont étudiés les stocks d’ouvrages publiés par les libraires-éditeurs Antoine Bailleul, Pierre-Hubert Renard et Gilbert-Urbain Guillaumin. Cette thématique part des travaux fondateurs de Lucette Le Van Lemesle (2004) et complète l’historiographie en mettant l’accent sur deux points : a) la rentabilité de ces maisons d’édition à long terme ; b) les choix idéologiques de la politique éditoriale retenue (optique libérale ou non). L’interface avec les revues de gestion et d’économie politique sera effectuée dans le droit-fil des travaux dirigés par Patrice Bret, Constantin Chatzis et Liliane Pérez (2008). -(ii) La numérisation scientifique des ouvrages classiques de gestion et d’économie pratique. La ressource Gallica est encore embryonnaire à ce niveau et très en retard sur les sites d’Harvard ou de la London School of Economics. Ont été numérisés en partie la somme de Chambonnaud (1918-1931) et le livre fondateur de Courcelle-Seneuil (1854). La partie « marketing » est un enjeu très important car les ventes en librairie des ouvrages pédagogiques sont en chute libre depuis quelques années. Une étude sémantique du contenu de ces ouvrages classiques sera aussi entreprise. Ces travaux représentent une valeur ajoutée spécifique du programme « Economie et Gestion de la Culture et du Numérique ». En effet, ils déboucheront sur la numérisation et la mise en ligne de livres et de revues rares (pour certains, non disponibles à la BNF) qui constitueront une base d’archives consultables pour les enseignants et chercheurs en économie et gestion.

Régulation du secteur des télécommunications
L’analyse des conditions de régulation du secteur des télécommunications sera envisagée. Cette question est essentielle dans la mesure où elle touche directement au déploiement des nouveaux réseaux sur lesquels de nouveaux services pourront être mis en place et où elle influence les conditions d’exploitations des services en ligne. Nous étudierons notamment : la régulation du déploiement des réseaux en fibre optique, en tenant compte du rôle des collectivités locales et des impacts des décisions réglementaires sur l’aménagement du territoire ; l’impact de la régulation sur la nature des investissements réalisés, non seulement par les opérateurs mais également, en amont par les équipementiers et, en aval, par les fournisseurs de services ; l’articulation entre politiques et régulations concurrentielles, d’une part, et politiques industrielles et commerciales, de l’autre, en nous appuyant sur des travaux théoriques et des comparaisons internationales ; la régulation de la neutralité d’Internet sera également envisagée, comme élément majeur du développement des réseaux et de la répartition des revenus ; enfin, nous nous proposons d’envisager un sujet jamais abordé jusque là dans le secteur : celui de la régulation de la complexité tarifaire.